GENÈVE, 30 août 2024 — Les experts des droits de l’homme des Nations unies ont exprimé leur profonde inquiétude face à l’adoption récente par les talibans d’une « loi sur la promotion de la vertu et la prévention du vice ». Cette législation, qui renforce l’emprise déjà répressive des talibans sur la société afghane, marque une nouvelle étape dans la régression des droits humains en Afghanistan.
Cette loi, qui rappelle fortement le régime draconien des talibans des années 1990, impose des restrictions sévères sur divers aspects de la vie quotidienne, en particulier pour les femmes et les minorités. Selon les experts de l’ONU, la loi étend et renforce des politiques discriminatoires existantes, comme les codes vestimentaires obligatoires et la ségrégation des sexes dans les espaces publics. Elle introduit également des mesures inédites, notamment des sanctions pour les femmes qui chantent ou parlent en dehors de leur domicile, ainsi que des restrictions strictes sur l’apparence des hommes et des garçons.
Les experts ont également souligné l’escalade de la persécution contre les personnes LGBTQ+ et les minorités religieuses. La nouvelle loi interdit les cérémonies considérées comme « non islamiques » et punit sévèrement toute association avec des « non-croyants ». Ces dispositions répressives renforcent l’isolement des groupes minoritaires et accroissent les risques de violence et de discrimination à leur égard.
En outre, cette législation impose des restrictions drastiques à la liberté d’expression, interdisant la publication de tout contenu jugé contraire à l’interprétation talibane de la charia. Ces restrictions mettent en danger les journalistes, limitant encore davantage la liberté de la presse en Afghanistan et entravant la circulation de l’information.
Les inspecteurs de la moralité des talibans se voient accorder un pouvoir étendu pour détenir et punir arbitrairement les individus pour des infractions morales présumées, sans exigences de preuve ni de procédure régulière. Ce renforcement du contrôle social exacerbe un climat de peur et de surveillance, en permettant notamment aux inspecteurs de pénétrer dans les domiciles privés, une grave atteinte au droit à la vie privée.
Les experts de l’ONU ont dénoncé cette législation comme une institutionnalisation de la discrimination et de l’oppression, la comparant à des crimes contre l’humanité, notamment en ce qui concerne la persécution fondée sur le sexe. Ils ont également appelé la communauté internationale, en particulier les États membres des Nations unies, à élaborer une stratégie concertée et fondée sur des principes pour répondre à cette situation, en mettant l’accent sur les droits de l’homme et l’égalité des sexes.
Selon les experts, l’absence d’une réponse internationale coordonnée et ferme pourrait non seulement renforcer l’impunité des talibans, mais aussi encourager d’autres abus similaires. Ils ont averti que la persistance des violations des droits des femmes et des filles en Afghanistan compromet gravement les perspectives d’un avenir stable, inclusif et prospère pour le pays.
Parmi les experts ayant signé ce communiqué figurent Richard Bennett, rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan, ainsi que plusieurs présidents et rapporteurs spéciaux des Nations unies spécialisés dans les droits des femmes, la liberté d’expression, et la protection contre la discrimination.