Des heurts violents ont éclaté fin avril dans les zones druzes au sud de Damas, faisant de nombreuses victimes parmi la communauté et les forces de sécurité, et ravivant les craintes d’une fragmentation confessionnelle de la Syrie.
D’après le chef spirituel druze Cheikh Hikmat Al-Hijri, le gouvernement syrien a mené une « attaque génocidaire injustifiée » contre la minorité druze lors de combats sectaires meurtriers dans les faubourgs de Damas, dénonçant un véritable « massacre » attribué à des milices pro-gouvernementales loyalistes.
Le bilan humain reste contrasté : le ministère syrien de l’Information fait état de 11 membres des forces de sécurité tués dans deux attaques distinctes, tandis que l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, basé au Royaume-Uni, dénombre 56 morts à Sahnaya et Jaramana, mêlant civils armés druzes et personnels de sécurité.
Les affrontements ont débuté aux environs de minuit lundi, après la diffusion sur les réseaux sociaux d’un enregistrement attribué à un clerc druze critiquant le prophète Mahomet. Celui-ci, Marwan Kiwan, a rapidement démenti toute responsabilité, mais la polémique a attisé la colère de nombreux fidèles sunnites.
Mercredi, quinze hommes druzes ont été tués dans une embuscade tendue sur une autoroute alors qu’ils se rendaient en renfort pour soutenir les groupes armés locaux contre les combattants pro-régime ; à ce jour, aucune faction n’a revendiqué l’attaque.
Un fragile accord conclu mercredi entre dignitaires druzes et représentants officiels a permis le retrait des combattants druzes de Sahnaya, tandis que les forces de sécurité et milices loyalistes investissaient la localité. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent notamment des miliciens pro-gouvernementaux maltraitant des captifs druzes et proférant des insultes à caractère sectaire.
Les Druzes constituent une religion parfois vue comme une branche minoritaire de l’ismaélisme, apparue au Xe siècle, et sont environ un million dans le monde : plus de la moitié réside en Syrie (principalement dans la province de Sweida et certaines banlieues de Damas), le reste vit au Liban et en Israël.
Le pouvoir en place, issu de l’effondrement du régime de Bachar el-Assad en décembre, est dirigé par Hayat Tahrir al-Cham (HTS), formation islamiste liée dans le passé à Al-Qaïda et perçue avec méfiance par les minorités. Malgré ses promesses de protection, le nouveau gouvernement peine à apaiser les tensions intercommunautaires.
Sur fond de répressions et de représailles confondues (notamment contre la minorité alaouite, qui a vu des quartiers incendiés et des civils exécutés), la communauté druze hésite désormais à déposer les armes, estimant qu’elles demeurent sa seule assurance-vie face à des violences jugées systématiques et impunies.