Le gouvernement malaisien a décrété une échéance au 31 décembre pour que chaque État harmonise la charia avec la constitution, suscitant un débat houleux sur la place de la loi islamique dans un pays marqué par des divisions ethniques et sociales profondes.
Dimanche dernier, le ministre des Affaires Islamiques, Mohd Na’im Mokhtar, a promis de traiter cette question avant la fin de l’année, en collaboration avec le sultan Sharafuddin Idris Shah de Selangor. Un comité spécial, dirigé par un ancien président de la Cour suprême, est également impliqué dans ce processus lancé l’année dernière.
Cette initiative intervient après la décision de la Cour Suprême malaisienne d’annuler 16 lois adoptées par l’État de Kelantan, qui couvraient divers délits selon la charia. La Cour a statué que les États ne peuvent pas promulguer de lois islamiques dans des domaines relevant du droit fédéral, mais peuvent les adapter pour refléter les opinions religieuses locales.
Cependant, le délai fixé par le gouvernement a soulevé des inquiétudes quant à la faisabilité de cette harmonisation dans un temps aussi court. Certains estiment que ce calendrier ne laisse pas suffisamment de temps au Parlement fédéral pour légiférer sur une question aussi complexe et sensible.
Depuis l’indépendance, la Malaisie est tiraillée entre la laïcité de l’État et l’islamisation croissante d’une population majoritairement musulmane. La question fondamentale demeure : les lois de la charia doivent-elles être alignées sur la constitution, ou bien la constitution doit-elle s’aligner sur les préceptes religieux ?
Actuellement, les lois pénales et familiales islamiques s’appliquent aux musulmans, tandis que les non-musulmans relèvent des tribunaux civils et des lois fédérales. Une révision de la constitution et des lois fédérales et étatiques en vigueur serait nécessaire pour parvenir à une harmonisation.
Cependant, toute modification suscitera des mécontentements au sein de la société malaisienne, d’autant plus que l’article 121(1A) de la constitution, qui stipule que les questions islamiques sont tranchées par les tribunaux de la charia de l’État, est au cœur des débats.
Dans cette atmosphère de tensions politiques et sociales, l’échéance fixée par le gouvernement soulève des questions cruciales sur l’identité nationale et la coexistence entre les différentes communautés religieuses en Malaisie.
Les prochains mois seront décisifs pour déterminer si la Malaisie parviendra à harmoniser la charia avec sa constitution dans le délai imparti, ou si cette question complexe continuera de diviser le pays.