Depuis le 7 octobre 2023, date des attaques du groupe Hamas contre Israël, l’Australie a vu une forte augmentation des incidents islamophobes, dont le nombre a considérablement augmenté entre octobre 2023 et novembre 2024. Cette montée de la haine envers la communauté musulmane s’est traduite par une multiplication des agressions physiques, des menaces et des violences verbales, particulièrement envers les femmes musulmanes portant le voile. Le climat de tension géopolitique exacerbée par le conflit israélo-palestinien a non seulement nourri des sentiments anti-musulmans mais a aussi plongé les membres de la communauté musulmane australienne dans un état de vulnérabilité accrue.
Les chiffres relatifs à cette hausse des incidents sont préoccupants. Environ 75 % des victimes sont des femmes musulmanes, ce qui a donné lieu à ce que les chercheurs appellent une « islamophobie genrée », où les femmes portant le hijab sont particulièrement visées. Les attaques physiques incluent des agressions dans les espaces publics comme les transports en commun, les écoles, et les lieux de culte, et sont souvent accompagnées de menaces de viol ou de violences verbales. Ce phénomène est exacerbé par l’augmentation des agressions en ligne, qui représentent une part importante de ces incidents. Les cyberattaques, souvent anonymes, visent en particulier les femmes musulmanes, et incluent des menaces physiques, voire des incitations à la violence. Selon les rapports, les incidents en ligne ont connu une hausse de 530 % depuis octobre 2023.
Les autorités australiennes ont exprimé leur inquiétude face à cette situation. Le ministre de la Diversité culturelle, Steve Kamper, a qualifié ces menaces de « détestables », soulignant la nécessité de soutenir la communauté musulmane, notamment durant le mois sacré du Ramadan. Dans un contexte où les communautés musulmanes se sentent de plus en plus isolées et ciblées, le gouvernement a renforcé les mesures de sécurité autour des mosquées, et la police de la Nouvelle-Galles du Sud a intensifié ses patrouilles après des menaces évoquant l’attaque de la mosquée de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, en 2019.
Cette montée de l’islamophobie ne se limite pas à la violence physique ou verbale. Elle s’étend également à une tension grandissante au sein des différentes communautés religieuses et ethniques du pays. Un exemple frappant est l’attaque à la synagogue de Melbourne en décembre 2024, qui a mis en lumière les divisions intercommunautaires de plus en plus prononcées, exacerbées par la guerre en Gaza. Bien que cet incident ait visé la communauté juive, il a été interprété comme un reflet de l’intensification des tensions religieuses et ethniques, nourries par le conflit israélo-palestinien.
Les universitaires, notamment ceux de l’Université de Monash et de l’Université Deakin, ont examiné de près plus de 600 incidents islamophobes enregistrés au cours de l’année écoulée. Ils ont constaté que les femmes musulmanes, et en particulier celles qui portent le hijab, sont les principales cibles de ces attaques. Cette situation crée une atmosphère d’insécurité parmi les femmes musulmanes qui, au quotidien, se sentent de plus en plus vulnérables face à l’agression physique et verbale. Ce phénomène a conduit les chercheurs à parler d’une véritable « islamophobie genrée », où la visibilité religieuse devient un facteur aggravant des discriminations et violences subies.
Face à cette crise, plusieurs organisations communautaires et politiques ont appelé à une action législative plus ferme contre l’islamophobie. La Lebanese Muslim Association, l’une des principales organisations musulmanes en Australie, a dénoncé l’inaction des autorités et a exhorté à une législation renforçant les protections contre l’islamophobie. Cette montée des actes de haine soulève des questions cruciales sur la manière dont l’Australie gère la diversité religieuse et ethnique. En période de tensions géopolitiques, les autorités ont du mal à équilibrer la liberté d’expression et la lutte contre les discours de haine, et la communauté musulmane se trouve souvent en première ligne face à la montée de la radicalisation, tant au niveau local qu’international.
Les autorités australiennes ont adopté des mesures de sécurité supplémentaires, mais beaucoup estiment que ces réponses sont insuffisantes et réactives, et non suffisamment préventives. La montée de l’islamophobie en Australie met en lumière un besoin urgent de renforcer la lutte contre la haine et la radicalisation, tout en promouvant un discours inclusif et une coexistence pacifique. La question de la protection des communautés religieuses dans un contexte de tensions internationales est désormais au cœur du débat politique et social en Australie.
Le climat d’insécurité qui touche les communautés musulmanes, particulièrement les femmes, interpelle sur la manière dont la société australienne, dans son ensemble, prend en charge la diversité religieuse. Pour de nombreux observateurs, la crise actuelle doit inciter les responsables politiques et sociaux à repenser les mécanismes de soutien à la communauté musulmane, à renforcer les législations contre les discours de haine et à mettre en place des initiatives pour une meilleure inclusion de tous les groupes religieux dans la société australienne.