La Commission des États-Unis pour la liberté religieuse internationale (USCIRF) a demandé au gouvernement américain d’imposer des sanctions au Tadjikistan en réponse aux violations croissantes de la liberté religieuse dans ce pays. Cet appel à l’action fait suite aux récents amendements apportés par le président Emomali Rahmon à la loi de 2007 sur la réglementation des traditions et des cérémonies, qui restreignent encore davantage les pratiques religieuses.
Le 20 juin 2024, le président Rahmon a signé des amendements à la « loi sur les traditions » qui, entre autres mesures, interdisent aux enfants de participer à la coutume de l’idgardak de l’Aïd al-Fitr et de l’Aïd al-Adha et interdisent la vente, l’importation, la promotion et le port de vêtements considérés comme « étrangers à la culture nationale ». Cette disposition a été interprétée comme une interdiction de certains couvre-chefs religieux. Ces nouvelles interdictions s’ajoutent aux restrictions existantes concernant les circoncisions, les rituels de baptême, les mariages, les cérémonies de pèlerinage religieux et les funérailles.
Depuis 2016, le Département d’État américain a désigné le Tadjikistan comme un « pays particulièrement préoccupant » (CPC) en raison de ses graves violations de la liberté religieuse. Cependant, le département a délivré à plusieurs reprises des dérogations pour prendre des mesures autrement obligatoires en conséquence de cette désignation.
« Le gouvernement tadjik, sans se laisser décourager par les désignations répétées de CPC, continue de trouver de nouveaux moyens de restreindre davantage la liberté de religion, comme en témoigne le durcissement de la loi déjà répressive sur les traditions de 2007 », a déclaré Eric Ueland, vice-président de l’USCIRF. « Bien que le Département d’Etat désigne le Tadjikistan comme un CPC, le fait de le nommer et de lui faire honte n’est manifestement pas suffisant. La désignation ne sera efficace que si elle s’accompagne d’actions, telles que des sanctions ciblées ou d’autres conséquences.
Dans un discours prononcé le 9 mars 2024, avant le Ramadan, le président Rahmon a insisté sur la nécessité d’appliquer la loi sur les traditions, affirmant que les personnes portant des vêtements « étrangers » se croyaient « supérieures aux autres ». Ce langage fait écho à la loi sur l’extrémisme du pays, qui qualifie la promotion de la « supériorité » d’activité extrémiste. À la suite de ce discours, les autorités ont pris des mesures contre les personnes portant des vêtements « étrangers », obligeant les femmes à porter leur foulard à la manière « tadjike » et les hommes à se raser la barbe.
Selon certaines informations, le mois dernier, les autorités ont refusé l’entrée d’un hôpital local aux femmes qui ne portaient pas leur foulard à la manière tadjike et les ont menacées d’amendes. Dans le district de Sino, à Douchanbé, des fonctionnaires ont emmené de force des femmes portant des couvre-chefs « étrangers » et des hommes barbus dans un poste de police pour prendre leurs empreintes digitales et les photographier. En outre, à Douchanbé, des fonctionnaires ont arrêté un autre groupe d’hommes barbus, les ont forcés à se raser et leur ont fait payer les outils de rasage utilisés au cours de l’incident.
« Il est troublant d’assister à la récente vague de harcèlement contre ceux qui expriment leur foi d’une manière qui ne correspond pas à l’interprétation préférée de l’État », a déclaré Susie Gelman, commissaire de l’USCIRF. « Nous exhortons le gouvernement américain à conditionner l’assistance sécuritaire au gouvernement tadjik à la réforme de la loi sur les traditions, de la loi sur la religion de 2009 et de toute autre législation qui criminalise l’expression pacifique de la religion dans le pays ».
Dans son rapport annuel de 2024, l’USCIRF a recommandé au Département d’État de désigner à nouveau le Tadjikistan comme CPC pour avoir commis des violations systématiques, continues et flagrantes de la liberté de religion. En décembre 2023, l’USCIRF a publié un rapport sur la répression de la liberté religieuse au Tadjikistan. En outre, en juillet 2023, l’USCIRF a tenu une audience sur le Tadjikistan pour discuter des options politiques disponibles pour le gouvernement américain.
La Commission américaine sur la liberté religieuse internationale (USCIRF) est une entité fédérale indépendante et bipartisane créée par le Congrès américain pour surveiller, analyser et rendre compte de la liberté religieuse à l’étranger. L’USCIRF adresse au président, au secrétaire d’État et au Congrès des recommandations de politique étrangère visant à prévenir les persécutions religieuses et à promouvoir la liberté de religion ou de conviction.