Les évêques français ont récemment publié une étude approfondie visant à stimuler l’intérêt pour la foi tout en contribuant à la préservation du patrimoine religieux. Cette initiative s’inscrit dans un contexte où de nombreuses églises, notamment en milieu rural, se retrouvent menacées par le temps et le manque de moyens financiers.
Un exemple marquant de cette mobilisation est le chantier de restauration de la basilique Notre-Dame de la Garde à Marseille. Débuté le 2 février, ce projet comprend notamment la rénovation de la statue monumentale de la Vierge Marie, haute de plus de 11 mètres et recouverte de feuilles d’or. Située au sommet de la basilique, elle surplombe la Méditerranée et attire chaque année plus de deux millions de visiteurs. La campagne de financement, lancée en 2024 sous l’impulsion du cardinal Jean-Marc Aveline, vise à réunir les 2,6 millions de dollars nécessaires pour assurer la préservation de ce symbole religieux et patrimonial.
En parallèle, des initiatives locales témoignent de la volonté de nombreuses municipalités de préserver leur patrimoine religieux. C’est le cas de la commune de Saint-Biez-en-Belin, en Normandie, où l’église a récemment rouvert ses portes après une restauration financée par la municipalité. Ce type d’action souligne le dilemme auquel sont confrontés les élus locaux, tiraillés entre la sauvegarde d’édifices historiques et les contraintes budgétaires.
L’enquête menée par les évêques s’inscrit dans le cadre des États généraux du patrimoine religieux, dirigés par l’évêque émérite Alain Planet de Carcassonne et Narbonne. Ce projet, initié en septembre 2023 et finalisé en décembre 2024, vise à établir un dialogue avec les pouvoirs publics pour mieux préserver ces édifices. Les conclusions de l’étude, publiées en janvier, mettent en lumière l’impact de l’urbanisation sur la répartition des lieux de culte. Tandis que de nouvelles églises sont construites dans les centres urbains, de nombreuses églises rurales sont délaissées, faute de fidèles et de moyens pour assurer leur entretien.
Dans ce contexte, deux documents clés ont été élaborés. Le premier est un guide du mécénat, destiné à faciliter la mobilisation de fonds pour la restauration des édifices religieux. Le second est un accord type élaboré avec le Bureau des affaires religieuses du ministère de l’Intérieur, offrant un cadre pour la réaffectation de certains espaces tout en respectant leur vocation initiale. Plusieurs églises accueillent déjà des activités complémentaires, telles que des concerts, des bibliothèques ou encore des cours d’orgue, afin de maximiser leur utilisation sans altérer leur fonction spirituelle.
Le maintien de la gratuité des églises reste une priorité pour les évêques, en opposition à certaines propositions récentes, notamment celle d’introduire un droit d’entrée pour visiter la cathédrale Notre-Dame de Paris après sa réouverture en décembre. Cette suggestion, portée par le ministère de la Culture, a été immédiatement rejetée par l’archidiocèse de Paris, réaffirmant que ces lieux doivent rester accessibles à tous sans frais.
Outre la préservation matérielle des édifices, l’étude s’intéresse également au patrimoine immatériel, qui connaît un regain d’intérêt. Des traditions religieuses comme les processions, les confréries et les fêtes populaires connaissent un renouveau, notamment dans les zones rurales. Des événements comme la fête des moissons ont été réintroduits, dans un contexte où les préoccupations liées à l’agriculture et au changement climatique suscitent un retour à certaines pratiques ancestrales.
Les chemins de pèlerinage sont également en plein essor. Le Tro Breiz, une ancienne route bretonne tombée en désuétude depuis le XVIIe siècle, a été relancée en 1994, attirant aujourd’hui pèlerins et touristes. De même, les itinéraires français vers Saint-Jacques-de-Compostelle connaissent un succès croissant, avec des dizaines de milliers de marcheurs chaque année. De nouveaux tracés, comme la Via Ligeria le long de la Loire, ont été développés pour relier différentes régions aux grands chemins de pèlerinage européens.
Ce regain d’intérêt pour le patrimoine religieux ne se limite pas à un attachement historique ou touristique. En 2024, plus de 12 000 adultes et adolescents ont reçu le baptême en France à Pâques, un chiffre en forte augmentation. Pour de nombreux convertis, le patrimoine religieux a joué un rôle central dans leur démarche spirituelle, soulignant ainsi l’impact que ces lieux et traditions peuvent avoir au-delà de leur dimension patrimoniale.
Les évêques français considèrent cette tendance comme une opportunité à saisir. Le patrimoine religieux, en plus d’être un élément fondamental de l’histoire et de l’identité culturelle du pays, constitue un point de rencontre entre la société et la foi. Sa préservation et sa valorisation pourraient ainsi contribuer non seulement à la sauvegarde d’un héritage architectural unique, mais aussi à une redécouverte du sens spirituel qu’il porte en lui.