La Géorgie, l’un des plus anciens bastions du christianisme dans le monde, se retrouve actuellement au cœur d’un débat politique et religieux intense. Les tensions découlent d’un projet de loi controversé sur les « agents étrangers« , qui a suscité des manifestations massives à travers le pays. Cette législation proposée obligerait les organisations recevant plus de 20 % de leur financement annuel de l’étranger à s’enregistrer en tant qu’agents de l’étranger. Bien que le gouvernement affirme que cette mesure vise à promouvoir la transparence, de nombreux citoyens craignent qu’elle ne soit utilisée pour réprimer les voix critiques avant les élections législatives à venir.
Un aspect notable de ce débat est l’implication de l’Église orthodoxe géorgienne, une institution de grande importance dans le pays. Historiquement, l’Église a joué un rôle crucial dans la vie sociale et politique de la nation. Ainsi, il n’est pas surprenant de voir l’Église prendre position sur des questions politiques d’importance nationale.
Le soutien de l’Église au gouvernement, dominé par le parti Rêve géorgien, est devenu manifeste dans le débat sur le projet de loi sur les agents étrangers. Cette alliance entre l’Église et l’État s’inscrit dans une résistance au changement perçu, selon les dirigeants ecclésiastiques. Dans une déclaration publiée le 27 avril, le patriarcat a exprimé sa méfiance envers les « idéologies étrangères dangereuses » qui, selon lui, contribuent à la polarisation de la société. Cette position souligne l’engagement de l’Église envers la préservation des valeurs traditionnelles géorgiennes.
Les dirigeants du parti Rêve géorgien ont également tenté de justifier le projet de loi sur les agents étrangers comme une mesure de protection de la souveraineté nationale et des valeurs orthodoxes traditionnelles. Cette rhétorique s’est étendue à d’autres initiatives politiques, notamment une loi proposée contre ce qu’ils appellent la « propagande LGBT« , présentée comme une intrusion de l’Occident.
Cependant, toutes les voix religieuses ne sont pas alignées avec le gouvernement. Des prêtres de haut rang, dont l’archevêque Zenon Iarajuli, ont rejoint l’opposition au projet de loi sur les agents étrangers. Dans un commentaire, l’archevêque a exprimé ses inquiétudes quant aux répercussions potentielles de la loi sur les organisations de la société civile, y compris l’Église elle-même. Il craint que les dispositions du projet de loi ne stigmatisent les citoyens et les organisations non gouvernementales.
Les préoccupations soulevées par l’archevêque Iarajuli ne sont pas isolées. Anahit Mkhoyan, directrice de la branche géorgienne de Caritas Internationalis, a souligné les conséquences potentielles de la loi sur les organisations religieuses qui dépendent du soutien financier international pour fournir des services essentiels aux communautés locales.
Alors que le gouvernement et certains leaders religieux affirment que cette législation est nécessaire pour protéger les valeurs traditionnelles et la souveraineté nationale, d’autres voix, y compris des membres éminents de l’Église, expriment des préoccupations quant à son impact sur les libertés civiles et la capacité des organisations caritatives à remplir leur mission humanitaire. La manière dont ce débat évoluera dans les semaines à venir déterminera non seulement le paysage politique de la Géorgie, mais également la nature de son engagement avec la communauté internationale et les valeurs qu’elle représente.