Lundi dernier, l’archevêque de Canterbury, Justin Welby, a élevé la voix contre le projet du gouvernement britannique visant à envoyer des demandeurs d’asile directement au Rwanda. Selon lui, cette initiative compromettrait la position du Royaume-Uni dans le monde, en cherchant à externaliser la responsabilité morale et légale envers les réfugiés et demandeurs d’asile.
L’archevêque, qui siège à la Chambre des Lords, a critiqué une approche du droit international qui, selon lui, affaiblit la position globale du pays. Ses commentaires interviennent alors que les membres de la Chambre des Lords entament les débats sur le projet de loi du gouvernement sur la sécurité du Rwanda, qui vise à contourner les obstacles juridiques entourant l’envoi de migrants dans ce pays d’Afrique de l’Est.
Le cœur de la controverse réside dans la politique proposée, où les demandeurs d’asile resteraient de manière permanente au Rwanda. Cette mesure clé de la promesse du Premier ministre Rishi Sunak de « stopper les bateaux » transportant des migrants non autorisés vers le Royaume-Uni a déjà suscité des critiques.
Le plan, encore à l’étape de débat, a soulevé des préoccupations quant à son caractère inhumain et irréalisable par des groupes de défense des droits de l’homme. En novembre dernier, la Cour suprême britannique a jugé illégale cette politique, arguant que le Rwanda ne constitue pas un lieu sûr pour les réfugiés.
En réponse à cette décision judiciaire, la Grande-Bretagne et le Rwanda ont signé un traité visant à renforcer la protection des migrants. Le gouvernement de Sunak insiste sur le fait que ce traité permettrait de déclarer le Rwanda comme une destination sûre, malgré les critiques continues.
Si le Parlement approuve le projet de loi, le gouvernement aura le pouvoir de ne pas appliquer certaines dispositions de la législation britannique en matière de droits de l’homme dans le contexte des demandes d’asile liées au Rwanda. Cela rendra également plus difficile la contestation des expulsions devant les tribunaux.
Keith Stewart, membre conservateur de la Chambre des Lords, a souligné que le projet de loi « met hors de tout doute juridique la sécurité du Rwanda », et qu’il dissuadera les gens d’emprunter des itinéraires dangereux pour entrer dans le pays.
Cependant, la résistance au sein de la Chambre des Lords semble significative. Les membres de l’opposition et même certains conservateurs remettent en question la validité du projet de loi. Bien que la Chambre des communes l’ait déjà approuvé, la Chambre des Lords pourrait apporter des modifications ou retarder l’adoption de la loi.
L’ancien ministre de l’intérieur travailliste, David Blunkett, qualifie le projet de loi de « bâclé », tandis que d’autres, comme Terence Etherton, ancien juge de la Haute Cour, le décrivent comme une « parodie ». L’éminent historien Peter Hennessy va jusqu’à avertir que l’adoption de cette loi pourrait retirer au Royaume-Uni son statut de nation respectueuse de l’État de droit.
Dans ce débat animé, les prochaines semaines s’annoncent cruciales pour le sort de cette proposition gouvernementale. La question des droits des réfugiés et des demandeurs d’asile reste au cœur des préoccupations, tandis que la Chambre des Lords continue à peser les implications de cette politique controversée.