Alors que la Syrie amorce une transition après un demi-siècle de régime autoritaire sous la famille Assad, la question des libertés religieuses et de l’identité des minorités revient au premier plan. Salina Shambos, diplomate chypriote et envoyée spéciale pour la liberté religieuse et la protection des minorités au Moyen-Orient, a souligné l’importance de garantir ces droits dans le cadre d’une nouvelle constitution.
Lors d’une déclaration vendredi, Mme Shambos a mis en avant le patriotisme exprimé par les chefs religieux en Syrie, soulignant leur espoir de voir leur pays devenir plus inclusif et reconnu au sein de la communauté internationale. La guerre civile, qui a éclaté en 2011, a provoqué l’exode de nombreux chrétiens syriens, autrefois 10 % de la population, certains ayant soutenu Bachar al-Assad par crainte des mouvements islamistes radicaux.
Le gouvernement intérimaire plaide désormais pour une réconciliation nationale, visant à établir un climat de respect mutuel entre les différentes confessions. Dans un pays où les sunnites représentent environ 75 % des 23 millions d’habitants, avec une présence notable d’alaouites, de chrétiens, de chiites ismaéliens et de druzes, l’équilibre entre les communautés demeure une question sensible.
Mme Shambos a indiqué que, malgré une dynamique de changement, les préoccupations des minorités religieuses restent vives quant à leur place dans un futur cadre institutionnel. « Les dirigeants religieux et la société civile veulent des garanties pour un processus constitutionnel inclusif », a-t-elle affirmé lors d’un entretien avec l’Associated Press. Elle a ajouté que ces acteurs sont profondément attachés à leur pays, partageant un mélange de soulagement face à la fin d’une ère répressive et d’incertitude quant à l’avenir.
Bien que le gouvernement de transition envoie des signaux encourageants, des doutes subsistent quant à la concrétisation des engagements pris. « Les discussions sont en cours, mais il est crucial qu’elles se traduisent par des actions concrètes », a insisté Mme Shambos.
Au Liban, où elle a rencontré des responsables religieux des communautés orthodoxe, maronite, arménienne et évangélique arménienne, Mme Shambos a rapporté que ces derniers rejettent la qualification de « minorités », estimant que ce terme minimise leur rôle historique et sociopolitique dans la région. Cette visite, sa première mission officielle, avait pour objectif d’évaluer les attentes des différentes confessions en Syrie et au Liban.
La diplomate a souligné que la préservation des identités religieuses et culturelles, non seulement en Syrie mais aussi en Irak et dans d’autres pays du Moyen-Orient, est essentielle pour garantir la stabilité régionale. Son rôle s’inscrit dans l’initiative du président chypriote Nikos Christodoulides, qui ambitionne de positionner Chypre comme un pont entre l’Union européenne et le Moyen-Orient.
L’Église orthodoxe grecque de Chypre, entretenant des relations étroites avec les Églises orthodoxes de la région, ainsi que la présence de communautés chrétiennes arméniennes, latines et maronites sur l’île, renforcent cette position. Chypre, de par sa proximité géographique et culturelle avec le Moyen-Orient, pourrait ainsi jouer un rôle clé dans le dialogue interreligieux et la protection des minorités.
Mme Shambos a affirmé que les responsables syriens et libanais ont accueilli favorablement l’implication de Chypre dans ces enjeux. Elle a également rappelé que la renaissance de la Syrie doit être menée par ses citoyens, tout en sollicitant le soutien de l’Union européenne pour garantir une protection équitable des minorités dans la future constitution.